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«En matière de défense, nous ne pouvons faire cavalier seul»

iStock.com/mixmagic

«En matière de défense, nous ne pouvons faire cavalier seul»

Alors que les menaces mondiales s’amoncellent, l’Europe voit la nécessité de s’unifier. La signature d’un nouveau code de conduite pour la conclusion d’un contrat d’armement fournit l’occasion de jeter un coup d’œil sur cette tendance significative.

Chacun voit que l’unité européenne a été entravée par plusieurs points de désaccord. Ce que beaucoup ne voient cependant pas, c’est que, en dépit de ces problèmes, l’Union européenne continue d’avancer, bien qu’à petits pas, vers la réalisation d’une fédération unifiée et rationalisée de nations.

Début juillet, l’UE a fait un autre pas vers ce but quand 22 des 25 nations membres ont signé un nouveau code de conduite qui poussera le Continent vers un marché commun de l’armement.

Ce mouvement pourrait faire beaucoup pour augmenter la capacité militaire de l’UE.

Sous le code, qui s’appliquera à tous les États membres sauf au Danemark, à l’Espagne et à la Hongrie, il est exigé des ministères de la Défense nationale qu’ils placent de nouvelles offres d’armement et de défense sur un tableau d’affichage de l’Agence européenne pour la défense, où des sociétés européennes d’armement pourraient rivaliser pour les contrats. Un tel code de conduite est révolutionnaire en Europe, où il y a eu traditionnellement peu de compétition transfrontalière pour des contrats de défense et d’armement.

Le nouveau code, selon Nick Whitney, chef de l’Agence européenne de la défense, «créera de nouvelles occasions pour des sociétés à travers l’Europe; renforcera notre défense, notre base technologique et industrielle; et offrira le meilleur rapport qualité-prix aux forces armées et aux contribuables» (Washington Times, du 2 juillet). Des sociétés européennes d’armement faisant face à d’autres sociétés d’armement, dans la compétition pour l’obtention de contrats, seront conduites à investir plus de temps et d’argent dans le développement de nouvelles technologies, et à devenir plus efficaces et accessibles.

Alors que s’accroît la compétition, nous pourrions voir aussi plus de fusions et de rachats parmi des sociétés européennes d’armement. À terme, ce nouveau code de conduite pourrait faciliter la formation de quelques conglomérats géants de l’armement en Europe.

Le temps démontrera que ce nouveau code de conduite est un petit pas, mais un pas significatif, vers un système de défense européen unifié.

En ce qui concerne l’acceptation enthousiaste du nouveau code, Javier Solana, chef des Affaires étrangères et de la sécurité européenne, a dit que cela montre que «il y a une prise de conscience commune qu’aucun de nous ne peut plus longtemps se permettre de faire cavalier seul en matière de défense» (EUobserver.com, du 3 juillet; c’est moi qui souligne).

Pourquoi des nations européennes estiment-elles qu’elles ne peuvent «se permettre de faire cavalier seul» plus longtemps en matière de défense? Le commentaire de J. Solana ouvre une fenêtre dans l’inquiétude de l’Europe sur la réalité rapidement changeante de la géopolitique d’aujourd’hui. À l’est, la Russie s’enhardit; au sud, la ferveur islamique monte; les États-Unis perdent rapidement de l’intérêt en Europe—et les leaders européens sont inquiets. De façon à gérer les menaces qui se développent, ils perçoivent la nécessité d’unir leurs ressources et d’agir comme un seul.

Attendez-vous, alors, à ce que l’Europe poursuive, plus ardemment, dans les mois et les années qui viennent, la formation d’un système de défense rationalisée étendu au Continent.

La crainte motive

La Trompette n’ignore pas les grands obstacles que ce projet de l’Union européenne doit franchir, s’il veut aboutir. Nous croyons simplement que, dans la mesure où les nations européennes font de plus en plus face à d’énormes pressions internes et externes, elles seront plus motivées pour franchir les obstacles empêchant leur unification.

La crainte est une émotion énergisante. Demandez à un homme de franchir une barrière de plus de 2 m, il refusera probablement. Lâchez un chien d’attaque enragé, l’écume à la gueule, et l’homme trouvera soudainement l’énergie pour franchir la barrière afin d’échapper au chien en colère. En Europe, les craintes vont motiver les nations afin qu’elles escaladent les obstacles empêchant actuellement leur unification en une puissance unique.

Le fait que 22 des 25 États membres de l’UE sont prêts à mettre de côté une histoire d’attribution de contrats de défense à des sociétés dans leurs propres frontières, et à signer ce nouveau code de conduite, démontre ce point—et confirme le soupçon d’une tendance croissante en Europe.

Comme J. Solana l’a dit, parmi les états européens «il y a une prise de conscience commune qu’aucun de nous ne peut plus longtemps se permettre de faire cavalier seul en matière de défense». Dans quelque temps, ils se rendront compte qu’ils ne peuvent plus «se permettre de faire cavalier seul» dans quelque domaine que ce soit—en économie, dans les communications, dans le commerce, et la liste continue. Plus ces nations mettront de côté leurs différences, et embrasseront le projet européen, plus elles prendront conscience des bénéfices qu’il y a d’avoir un gouvernement central unifié.

L’histoire fournit le plan sur la façon dont cela arrivera. Maintes et maintes fois, la grandeur européenne a dépendu principalement de deux facteurs: l’Allemagne et le Vatican. Attendez-vous donc à ce que tous les deux jouent un rôle plus central dans les affaires européennes, dans les temps qui viennent. Alors que l’Église catholique cherche à redonner à l’Europe son héritage spirituel et «chrétien», l’Allemagne travaillera à unir politiquement le continent, et à contrôler tous les éléments requis pour une superpuissance mondiale—y compris une armée strictement européenne, fortement organisée et développée.

Vu de cette perspective, il n’est pas improbable que l’Organisation pour le Traité de l’Atlantique Nord (l’otan), conçue par les Américains, puisse faire face à sa mort. Alors que diverses armées de l’Europe se rationalisent graduellement vers une armée unique sous un leadership unique, ces armées nationales peuvent fermement esquiver leur engagement envers l’otan pour jeter leur poids derrière leur propre armée européenne.

Il est important, dans les mois à venir, de passer en revue les récits déplorant l’échec de l’unification européenne—et de voir clairement la force effrayante qui se met en place, progressivement, en dehors de cet environnement chaotique. La formation de cette superpuissance européenne est l’un des événements les plus importants que vous pourriez observer. 

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