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L’Allemagne resserre son emprise sur son empire européen

FREDERICK FLORIN/AFP/Getty Images

L’Allemagne resserre son emprise sur son empire européen

Nous pourrions bientôt avoir une UE qui indique à ses États membres comment gérer leurs propres pays.

L'Allemagne est dans une position étrange. Dans sa patrie, son gouvernement est à son plus faible depuis des années. Les divisions et les luttes internes abondent, même au sein du propre parti de la chancelière Angela Merkel, alors que son autorité s'affaiblit.

Mais en Europe, l'Allemagne est forte. Elle effectue une poussée audacieuse pour officialiser son contrôle sur l'Union européenne.

Dans le dernier plan budgétaire à long terme, le commissaire du budget de l'UE, Günter Oettinger (qui se trouve à être allemand) a dévoilé une nouvelle proposition de politique. Elle priverait les pays membres de leur financement de l'UE s'ils ne respectaient pas les exigences de l'UE en matière de « règle de droit » [ou l’autorité de la loi].

En théorie.

En pratique, cela donnerait aux plus grands États européens la possibilité de faire chanter les plus petits.

Vous pouvez le constater dans la manière dont l'Europe utilise déjà ses contrôles de « règle de droit ».

L'UE poursuit actuellement la Pologne pour violation des règles de droit. Si elle réussit, elle pourra priver la Pologne de ses droits de vote de l'UE—si tous les autres pays sont d'accord. Quelle est la grande transgression de la Pologne contre la base des tenants fondamentaux de la liberté ? L'UE accuse le gouvernement polonais d’altérer la composition de ses juges dans sa cour constitutionnelle. C'est une imposture. L'Espagne a fait presque exactement la même chose et l'UE n'a rien dit. La différence est, l'UE approuve le gouvernement espagnol, mais pas celui de la Pologne.

Les propositions d'Oettinger augmenteraient considérablement la puissance de l'UE. Si la Commission européenne estime qu'un pays a violé la règle de droit, des sanctions financières entreraient en vigueur. Seule une large majorité au Conseil européen pourrait arrêter ces sanctions. Au Conseil, les règles de vote prennent en compte la population. L'Allemagne est la nation la plus peuplée d'Europe. Donc, si elle veut imposer des sanctions sur un pays et qu’elle puisse avoir quelques autres nations de son côté, le reste du Conseil ne peut pas les arrêter.

Nous pourrions bientôt avoir une UE qui indique à ses États membres comment gérer leurs propres pays. La bureaucratie de l'UE lutte déjà des gouvernements démocratiquement élus en Pologne et en Hongrie. Si elle obtient le pouvoir proposé par Oettinger, elle aurait encore plus d'autorité pour dicter aux nations membres ce qu'on leur dit.

Ceci n’est juste que le dernier d'une tendance de longue date. Hans Kundnani a noté dans le Berlin Policy Journal le mois dernier que dans la vision de l'Allemagne pour l'Europe, « plus d'Europe signifierait plus d'Allemagne—comme dans de nombreuses mesures déjà prises lors des sept dernières années depuis que la crise de l'euro a commencé. »

« En plus de devenir plus allemande, l'UE est devenue plus contraignante depuis le début de la crise de l'euro en 2010 », a-t-il écrit. « L'intégration plus poussée est tombée quelque part dans le large éventail entre volontaire et forcée. »

Kundnani a écrit : « Il est particulièrement frappant de voir comment … des termes tels que ‘surveillance budgétaire’ et ‘discipline fiscale’ sont devenus de plus en plus essentiels au fonctionnement de l'UE. » La réponse de l'Europe à la crise de l'euro a été à propos de beaucoup plus de contrôle allemand sur les économies des autres pays. « Les développements depuis n'ont fait que confirmer et fait avancer cette transformation », a écrit Kundnani. « Le sommet d'urgence organisé à Bruxelles en juillet 2015 pour discuter de la situation de la dette grecque pourrait s'avérer être un tournant décisif dans l'histoire de l'UE. » C'est une tendance que la Trompette a noté dans « Regardez qui gouverne l’Europe ! ». La Grèce a essayé de défier l'Allemagne et l'Allemagne en a fait un exemple. L'humiliation des Grecs a envoyé un message puissant à tous les autres pays membres de l'UE.

Cette dernière tentative d'utiliser le budget comme un mécanisme pour punir les nations « fait partie d'une large tendance à étendre la contrainte dans l'UE », a écrit Kundnani. « Même les États membres de l'UE qui s'inquiètent de la déconsolidation démocratique dans des pays comme la Hongrie et la Pologne se demandent si cela pourrait aussi se retourner contre elles. » Il a noté : « Le danger est que l'UE soit de plus en plus perçue comme un véhicule pour l’imposition des préférences allemandes. »

Le Selmayrgate

Au même moment, l'Allemagne s’est immiscée à des positions clés au sein de l'UE. Avec l'aide d'Oettinger, Martin Selmayr, un autre Allemand, a pris le poste de fonctionnaire le plus puissant de l'UE en mars.

La nomination de Selmayr en tant que secrétaire général de la Commission européenne était si obscure que la presse européenne s'y réfère en l’appelant communément le « Selmayrgate ».

La Commission européenne emploie 33,000 fonctionnaires. C'est beaucoup de responsabilités. C'est pourquoi le poste de secrétaire général est ouvert uniquement aux personnes qualifiées qui ont déjà fait leurs preuves en travaillant à un niveau élevé dans la fonction publique européenne.

Selmayr a servi à ce niveau, en tant que secrétaire général adjoint, pour seulement quelques minutes.

La Commission a dit officiellement peu de choses à propos de ce qui s'est réellement passé. Mais un commissaire anonyme a partagé les détails avec Jean Quatremer, correspondant européen pour le journal Libération.

La source de Quatremer a déclaré que lors d'une réunion de la Commission européenne, le président Jean Claude Juncker a proposé de nommer Selmayr au poste de secrétaire général adjoint. La Commission a approuvé. Puis Juncker a annoncé que l'actuel secrétaire général avait démissionné et que Selmayr prendrait sa place.

La source de Quatremer allègue que la Commission a ensuite été soudoyée pour ne pas protester contre la manière trompeuse dont Selmayr a obtenu le poste. Les commissaires de l'UE reçoivent deux tiers de leur salaire pendant environ deux ans après leur départ. Selmayr a proposé d'étendre cette pension à trois ou cinq ans, et a également offert des avantages supplémentaires comme une voiture de fonction et un chauffeur.

Quatremer l'a qualifié de « coup d'État brillamment exécuté qui a donné à ce bureaucrate allemand de 47 ans un contrôle presque total de la machine de l'UE ». Son commissaire informateur l'a qualifié de « prise de pouvoir impeccablement préparée et audacieuse ».

Le Parlement européen a été si indigné par le processus, il a voté à l'unanimité pour enquêter sur la nomination de Selmayr. Il a également adopté une résolution disant que la nomination « pourrait être considérée comme une action semblable à un coup d'État ». Au cours du débat, un membre néerlandais du Parlement a déclaré que cette nomination « détruisait toute la crédibilité de l'Union européenne ». Un eurodéputé hongrois a déclaré : « Quand cela convient à la commission, elle ignore les règles, c'est-à-dire la règle de droit ».

« Selmayr a longtemps fait preuve de dédain et de mépris pour les rouages traditionnels de la Commission, et sa volonté de forcer ses collègues et de contraindre les opposants, lui ont valu le surnom de Monstre du Berlaymont », a écrit Politico, en référence à l’édifice dans lequel la Commission européenne se réunit. « Un résultat de la combinaison de l'ascension et de la réputation de Selmayr a été une série d'allégations sur quel autre type de prise de pouvoir pourrait suivre sur son agenda ».

Sa nomination a également suscité des plaintes que l'Allemagne a trop de pouvoir. Les Allemands occupent maintenant les postes de secrétaire général dans la fonction publique, le Parlement européen et le ministère des Affaires étrangères de l'Europe—le Service européen pour l’action extérieure. Le média Politico a cité un diplomate anonyme de l'UE disant que la nomination de Selmayr était un « coup de force qui donne beaucoup de pouvoir aux Allemands ».

L'Allemagne dominait déjà l'UE. Mais historiquement, elle l'a fait à travers sa population dominante et les politiques émanant de son gouvernement national. « Nul ne peut contester le rôle de leader de l'Allemagne » en Europe, a écrit le Berlin Policy Journal. « Berlin devient de plus en plus une centrale pour tout ce qui concerne les questions politiques européennes. » Cependant, « il ne s'agit pas des postes que détiennent les Allemands à Bruxelles ».

Maintenant, en plus d'avoir la plus grande population de l'Europe, sa plus grande économie et son pouvoir politique prééminent, les Allemands détiennent également plus de postes à Bruxelles. Et ils utilisent leurs postes pour accroître le pouvoir de l'UE (et de l'Allemagne) sur les autres nations.

Peut-être que la pression de Berlin pour changer les règles budgétaires de l'UE et la nomination douteuse de Selmayr fait partie de la formalisation par Berlin de sa domination sur l'Europe.

Une étape majeure dans ce processus pourrait venir l'année prochaine, lorsque la présidence de la Banque centrale européenne (bce) deviendra vacante. La coalition allemande a déjà accepté que le président de la Bundesbank, Jens Weidmann, obtienne le poste.

Avec Weidmann en poste, le contrôle allemand sur l'économie européenne serait complet. Les anciens dirigeants de la bce ont imprimé de l'argent et l'ont transmis aux pays les plus pauvres d'Europe du Sud. Weidmann n'y croit pas. Lorsque l'Europe du Sud aura besoin de liquidités, elle devra demander de l'aide à la bce ou à l'Allemagne. D'une manière ou d'une autre, les Allemands décideront s'ils obtiennent des prêts.

Ce sera une lutte pour l'Allemagne d’obtenir ce poste pour Weidmann. Et il semble probable que le plan de l'Allemagne de bloquer des fonds aux pays désobéissants sera lui-même bloqué. Mais ce qui est clair, c'est que l'Allemagne pousse pour que plus d'Allemands arrive à obtenir un pouvoir plus formel dans l'Union européenne.

Un empire européen ?

Un grand territoire composé de multiples nationalités formellement contrôlée par une autorité a un nom : un empire. C'est une étiquette que de plus en plus de gens utilisent pour décrire l'Europe. Gwythian Prins, un universitaire et un conseiller du gouvernement, a écrit le mois dernier dans le Telegraph que l'Europe « ressemble à un empire ».

« Il marche comme un empire », a-t-il poursuivi. « Il parle certainement comme un empire—écoutez [le président du Conseil européen Donald] Tusk. Il traite ses sujets comme un empire. Ils grognent en rebellions, comme le font des États vassaux. Ses souverains, l'élite de Bruxelles, emplissent leurs nids comme le faisaient leurs prédécesseurs en urss. En 2007, le président de la Commission, José Manuel Barroso, l'a appelé un empire. Je pense que nous pouvons dire sans risque que l'UE est un empire ».

Même le Der Spiegel allemand a écrit, en 2015, que « le mot ‘reich’, ou empire, n’est peut être pas tout à fait hors de propos » en décrivant l'Allemagne moderne. Il a conclu qu’un « empire est en jeu, au moins dans le domaine économique ».

L'Europe dirigée par les Allemands ressemble à un empire avec chaque année qui passe.

La Trompette et la Pure Vérité ont mis en garde contre cet empire pendant des décennies. En 1945, le fondateur de la Pure Vérité, Herbert W. Armstrong, a déclaré que l'Allemagne se lèverait à nouveau pour dominer l'Europe à travers une « Union européenne ».

En 1973, il a écrit : « La prophétie biblique a révélé que cet empire commencerait comme un mouvement économique—qu’il apporterait une ère de prospérité inhabituelle en Europe. Cela a vraiment commencé en mars 1957, quand six pays européens—l’Allemagne de l’Ouest, la France, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg—ont signé le Traité de Rome, créant la Communauté économique européenne. … Comment savais-je, déjà en 1927, que ces États-Unis d’Europe à venir s’élèveraient—dans notre temps ? Je le savais parce que je l’ai vu clairement révélé dans la prophétie biblique ». 

Dans les années 1990, le rédacteur en chef de la Trompette, Gerald Flurry, écrivait dans sa brochure La conquête des Balkans par l’Allemagne : « Ce ne sera pas long avant que l'Europe soit bientôt réunie en tant que Saint Empire romain. Il sera dirigé très fermement par l'Allemagne ».

Comment M. Armstrong pouvait-il prédire, dès 1945, la naissance d'un empire dirigé par les Allemands en Europe ? Et comment pourrait-il prévoir que cela commencerait par une union de nations européennes et une domination économique ?

Ses prévisions provenaient toutes de la Bible. Cela peut être tourné en ridicule par plusieurs aujourd'hui, mais de quel autre endroit pouvez-vous obtenir un aperçu aussi avancé de ce qui se passe en Europe ? 

Ger Fr Bo