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Un appel poétique pour trouver une femme vaillante

Harold Copping

Un appel poétique pour trouver une femme vaillante

Le point que le grand poème acrostiche de Proverbes 31 tente de faire ressortir

Étudier la profondeur d’un mot hébreu s’apparente souvent au travail d’un archéologue. Passer au crible le texte biblique pour voir comment il est utilisé peut ouvrir toute une série de perspectives.

L’un de ces mots est le chayil hébreu. Il est utilisé sous une forme ou une autre 243 fois dans la Bible hébraïque—généralement traduit par « armée », « troupes », « forces » ou des expressions apparentées se rapportant à des groupements militaires ; il peut également se référer simplement à un grand nombre de personnes. Il est fréquemment traduit par des mots relatifs à la « puissance » ou à la « force », ainsi que par des mots relatifs à la « richesse » ou à la « substance ».

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Il est utilisé à de nombreuses reprises comme « vaillant » ou « bravoure »—qu’il s’agisse de la bravoure d’une personne (David face à Goliath) ou d’un groupe de personnes vaillantes (les soldats au service du roi David). Il peut désigner un homme au « cœur de lion » (2 Samuel 17 : 7-10), et il n’est certainement pas nécessaire qu’il désigne des soldats, puisque certains sacrificateurs et lévites ont également été décrits de cette manière.

Le mot n’est pas non plus réservé aux hommes. L’une des utilisations les plus remarquables de ce mot—compte tenu de tous les usages susmentionnés—se trouve dans Proverbes 31 : « Qui peut trouver une femme vertueuse ? Elle a bien plus de valeur que les perles » (verset 10).

Le poète utilise pour la décrire le même mot que celui associé aux militaires, à la bravoure et à l’abondance.

Auteure féminine, public masculin

Ce verset s’adresse à celui qui cherche et qui trouve. Il ne s’agit pas de Qui peut être une femme vertueuse ?, bien qu’une lectrice puisse l’entendre ainsi. Proverbes 31 s’adresse plutôt à un homme, comme le montrent non seulement le poème, mais aussi la mise en scène.

Le verset 1 l’attribue à la mère du roi Lemuel—les personnages n’étant vraisemblablement autres que Salomon et sa mère Bath Schéba—qui l’a ici « corrigé ».

La chronologie biblique montre que Salomon a épousé Naama l’Ammonite et a eu Roboam avant la mort de David. Bath Schéba était encore en vie lors de ce mariage (Cantique des cantiques 3 : 11 mentionne sa présence à l’un de ses mariages). Lorsqu’il est devenu roi, Salomon était connu pour avoir tenu compte des conseils de sa mère (voir 1 Rois 2 : 17-20).

Lorsque le Proverbe 31 a été rédigé, Bath Schéba estimait que son fils avait besoin d’un avertissement sévère pour trouver une femme vaillante. Les versets qui précèdent le poème proprement dit montrent qu'il s'agit d'une admonestation ferme : « Ne livre pas ta vigueur aux femmes. Et tes voies à celles qui perdent les rois » (verset 3). Il est intéressant de noter qu’il est dit au roi de ne pas donner son chayil à une femme, mais qu’au verset 10, il lui est dit de trouver une femme de ce calibre de force.

Bath Schéba pourrait bien avoir indiqué à Salomon une autre femme vaillante de l’histoire, son arrière-arrière-grand-mère Ruth. Bien que chayil soit utilisé à quelques reprises dans les Proverbes pour décrire les grandes femmes en général, la seule femme expressément nommée en relation avec ce mot est Ruth (Ruth 3 : 11).

Un argument alphabétique

Pour détailler la valeur de ce type de femme, Bath Schéba présente son admonition sous la forme d’un acrostiche alphabétique. Cela ne se traduit pas très bien en français, mais essayez de comprendre ce procédé poétique. Si quelqu’un vous présentait un argumentaire de cette manière—en énonçant tous les avantages d’une chose en anglais en commençant par A, B, C, etc., vous auriez l’impression que son argument est 1) complet : c’est-à-dire approfondi et exhaustif, ainsi que 2) logique : c’est-à-dire qu’il s’adresse à un ordre intrinsèque, plutôt qu’à la subjectivité et à l’émotion. Ce proverbe fait appel à un raisonnement typiquement masculin lorsqu’il s’agit d’aborder et d’envisager les grandes décisions de la vie.

En outre, un acrostiche alphabétique crée également une augmentation cumulative, une intensification progressive de l’argument. L’ordre reconnaissable lui confère une nature mémorable, ou l’on pourrait dire que le premier mot de chaque vers—dans l’ordre alphabétique—est fondamental pour l’intention du poème. Cet aspect est perdu en français, car le premier mot de la plupart des vers est « Elle ». Cela n’a aucune valeur mnémotechnique. Considérez donc le premier mot de chaque verset !

L א e premier mot hébreu de Proverbes 31 : 10 (le premier verset de cet acrostiche) est femmeun mot qui commence par la première lettre de l’alphabet hébreu : « Qui peut trouver une femme vertueuse ? » La question est suivie de « Elle a bien plus de valeur que les perles », ce qui donne lieu à une comparaison monétaire.

Une citation du célèbre Premier ministre britannique Benjamin Disraeli me vient à l’esprit : « Une amie, aimable, intelligente et dévouée, est un bien plus précieux que les parcs ou les palais ; et sans une telle Muse, peu d’hommes peuvent réussir et aucun ne peut être heureux. »

Dans les Proverbes 3 : 15, 8 : 11 et 20 : 15, il est dit que les perles sont à peine comparables à la sagesse divine. Ce verset implique donc que trouver une telle femme est un acte de grande sagesse.

ב Mari est le premier mot du verset suivant—qui commence par la deuxième lettre de l’alphabet hébreu. « Le cœur de son mari a confiance en elle… ». Non seulement il lui a fait confiance avec son cœur, mais sa fiabilité signifie aussi que « les produits ne lui feront pas défaut. » L’hébreu sous-entend ici le butin ou le pillage. Sa valeur dépasse celle des perles et du butin de guerre.

ג Récompense , c’est ainsi que commence l’hébreu de Proverbes 31 : 12 : « Elle lui fait du bien, [c’est-à-dire qu’elle le récompense en bien] et non du mal, tous les jours de sa vie. » Voici encore un verset qui souligne sa valeur pour l’homme : après les versets décrivant les perles, puis les grands butins de guerre, ce verset souligne le retour sur l’investissement. En fait, les versets suivants expliquent en détail ce retour.

Un investissement inestimable

ד Cherche est le premier mot de Proverbes 31 : 13 : « Elle cherche de la laine et du lin, et travaille de ses mains avec joie » (traduction Darby française). Son assiduité est exercée avec beaucoup de plaisir !

ה Marchands ou « navires de commerce » est le premier mot du verset 14 : « Elle est comme un navire marchand, elle amène son pain de loin. » Cela aurait eu une résonance pour Salomon, qui avait une marine massive qui collectait l’or d’Ophir des extrémités du monde connu (1 Rois 9 : 26-28).

ו Aussi commence Proverbes 31 : 15 : « Elle se lève lorsqu’il est encore nuit, et elle donne la nourriture à sa maison et la tâche à ses servantes. » Ce verset commence par l’idée qu’en « Plus », elle s’engage à être productive quelle que soit l’heure de la journée.

ז Considère est le début du verset 16 : « Elle pense à un champ, et elle l’acquiert ; du fruit de son travail elle plante une vigne. » Ce mot hébreu signifie qu’elle est logique, rationnelle et raisonnable.

ח Ceint ouvre le verset suivant : « Elle ceint de force ses reins, et elle affermit ses bras » (verset 17). Elle est physiquement forte et capable de travailler dur et d’être industrieuse.

ט Perçoit est le premier mot du verset 18 : « Elle sent que ce qu’elle gagne est bon ; sa lampe ne s’éteint point pendant la nuit. » L’homme qui lit le poème ferait bien de s’associer à une consommatrice aussi avertie, qui sait mettre les produits à l’épreuve.

י Main commence le verset 19 : « Elle met la main à la quenouille, et ses doigts tiennent le fuseau. » La femme de Proverbes 31 est créative et industrieuse, elle est prête et capable de fabriquer des choses à la main si quelque chose ne peut pas être acheté.

כ Paume, comme le dit l’hébreu, commence le verset qui dit : « Elle tend la main au malheureux, elle tend la main à l’indigent » (verset 20). L’image que donne la paume montre que sa main est ouverte. Elle est charitable. Sa nature généreuse est un atout inestimable pour tout foyer.

ל Le verset 21 commence par une négation : Pas de crainte (« Elle ne craint pas la neige pour sa maison, car toute sa maison est vêtue de cramoisi »). Elle a travaillé dur pour subvenir aux besoins de sa famille (à cet égard) et elle est confiante dans le travail qu’elle a accompli.

מ L’hébreu du verset 22 commence par : Des couvertures de tapisserie (« Elle se fait des couvertures, elle a des vêtements de fin lin et de pourpre »). Elle est créative. Les références au fin lin et à la pourpre évoquent des images du tabernacle dans l’ancien Israël. Elle est vêtue des mêmes étoffes trouvées dans la composition du tabernacle, ainsi que sur les sacrificateurs élégamment vêtus qui servaient dans cet environnement.

נ Connu est le premier mot du verset 23—dans le sens de bien connu : « Son mari est considéré aux portes, lorsqu’il siège avec les anciens du pays. » Elle est un atout pour sa réputation ; elle permet de meilleures relations publiques.

ס Le verset 24 s’ouvre en parlant de lin fin : « Elle fait des chemises [de fin lin], et les vend, et elle livre des ceintures au marchand. » Dans ce cas de lin fin, nous voyons qu’elle peut les fabriquer elle-même au point de pouvoir les vendre avec profit.

ע L’anglais du verset 25 commence par le même mot que l’hébreu : « Elle est revêtue de force et de gloire, et elle se rit de l’avenir. » La seconde moitié de ce verset souligne la force positive qu’elle représente dans la vie de chacun : même dans « l’avenir »—une expression porteuse d’un sens d’incertitude—elle est connue pour son optimisme.

פ Bouche est le premier mot du verset 26—sa bouche, à savoir : « Elle ouvre la bouche avec sagesse, et des instructions aimables sont sur sa langue. » Dans l’esprit de considérer le rendement d’un « investissement », le profit de sa bouche est la sagesse et l’amabilité, plus d’attributs qui dépassent de loin le gain monétaire.

צ Les mots hébreux qui commencent le verset 27 sont rendus en français par veille—ce qui signifie monter la garde : « Elle veille sur ce qui se passe dans sa maison, Et elle ne mange pas le pain de paresse. » Cette femme est capable de s’occuper de son foyer de manière indépendante.

ק Se lever commence au verset 28, parlant des enfants respectueux qu’elle élève : « Ses fils se lèvent, et la disent heureuse ; son mari se lève, et lui donne des louanges. » Toute sa famille reconnaît qu’elle est une bénédiction.

ר Le français du verset 29 commence par le même mot que l’hébreu : « Plusieurs filles ont une conduite vertueuse ; mais toi, tu les surpasses toutes. » « Vertueuse » est l’hébreu chayil ! Cet homme peut reconnaître le chayil dans un grand nombre de femmes admirables, mais le but de ce proverbe est la responsabilité de l’homme de trouver celle qui les surpasse toutes.

Traits intemporels

Réfléchissez un instant à ce que cette « liste » du Proverbe 31 dit de la beauté physique. Jusqu’à présent, il n’y a rien sur son apparence. Il n’y a rien non plus dans Ruth sur son apparence physique, seulement sur son assiduité et sa loyauté. Dans Proverbes 31, il est question de sa force physique. Mais là encore, il s’agit surtout d’éthique du travail et de sagesse. Il est question de sa garde-robe (plus de ce qu’elle représente dans son caractère). Mais les seules parties du corps mentionnées sont les bras, les mains, les paumes, la bouche et la langue (ces deux dernières en termes d’élocution), ainsi que la ceinture des reins.

ש Pour mettre le verset 30 dans l’ordre correct des mots, il faudrait lire : trompeuse est la grâce. «  La grâce est trompeuse, et la beauté est vaine ; la femme qui craint l’Éternel est celle qui sera louée. » Voici une autre mise en garde de Bath Schéba—pour que l’homme se méfie des choses qui sont fausses ou temporaires. C’est le seul verset de Proverbes 31 qui parle de sa beauté, et il dit que la beauté est comme une vapeur. La beauté n’a pas été prise en compte dans « l’analyse coût-bénéfice » de Proverbes 31. Pourquoi ? Tous les avantages—tous les retours sur « l’investissement »—sont des caractéristiques permanentes. La beauté dans le domaine physique change : elle se fane, s’affaisse et se ride. Mais notre poétesse affirme qu’une femme pieuse est digne de louanges durables.

ת Le français du dernier verset commence par le même mot que l’hébreu : « Donnez -lui du fruit de ses mains, et qu’aux portes ses œuvres la louent » (verset 31, traduction Darby française). Encore une fois, cela s’adresse à l’homme. Il ne manque de rien en donnant à une femme de cette manière ! La fin du poème semble un avertissement : vous pouvez la louer ou non ; de toute façon, ses œuvres parleront d’elles-mêmes—« aux portes », ou à l’endroit même où elle peut vous faire être considéré, comme le souligne le verset 23.

Concluons par une autre utilisation du mot hébreu chayil. Bien qu’il soit souvent utilisé dans le contexte de grandes organisations militaires, de vaillants soldats et de riches individus, Ruth 4 : 11 l’utilise dans le contexte du mariage lui-même—le mariage même auquel Bath Schéba faisait probablement référence dans son chef-d’œuvre acrostiche : « Tout le peuple qui était à la porte et les anciens dirent : Nous en sommes témoins ! Que l’Éternel rende la femme qui entre dans ta maison semblable à Rachel et à Léa, qui toutes les deux ont bâti la maison d’Israël ! Manifeste ta force [chayil] dans Éphrata, et fais-toi un nom dans Bethléhem ! »

C’est une bénédiction pour Boaz : Que tu fasses preuve de vaillance et sois célèbre à Bethléem. Bien que ce mot ait été utilisé plus tôt dans le récit pour décrire la richesse de Boaz (Ruth 2 : 1), et bien qu’il ait été utilisé par Boaz pour décrire Ruth, il décrit ici ce que Boaz est maintenant capable de faire grâce à ce mariage. Il pouvait vraiment agir dignement (vaillamment, avec beaucoup de substance, de puissance et de bravoure) parce qu’il avait trouvé cette femme vertueuse.

Grâce à l’argument alphabétique ci-dessus, le destinataire se voit montrer le bénéfice matériel et immatériel qu’il y a à trouver, et par conséquent à épouser, une femme vaillante. En utilisant ce procédé littéraire, notre poétesse a établi un argument complet, ordonné, logique, progressif et intensifié qui constitue non seulement l’un des plus grands poèmes acrostiches de l’histoire biblique, mais qui met également son argument à l’abri de tout débat ou de toute contestation.

LA TROMPETTE EN BREF

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